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Prescription de la dette douanière : effet interruptif à l’égard de tous les co-débiteurs d’un PV notifié à un seul d'entre eux

Affaires - Pénal des affaires
Transport - Douane
06/07/2021
La prescription de la dette douanière étant interrompue à l'égard de tous les co-débiteurs de celle-ci par la notification d'un procès-verbal de douane à l'un quelconque de ceux-ci, un commissionnaire en douane, qui a reçu un procès-verbal 7 ans après le dépôt de ses déclarations, ne peut bénéficier de la prescription, au motif que son client importateur a fait lui l’objet de procès-verbaux, entre le dépôt des déclarations et le procès-verbal précité, qui ont donc aussi interrompu la prescription à l’égard de ce professionnel de la Douane, selon une décision du 23 juin 2021 de la Cour de cassation.
Une cour d’appel a retenu que la créance douanière d’un commissionnaire en douane était prescrite du fait qu'aucun acte de l'enquête ne lui avait été notifié depuis ses déclarations déposées du 28 janvier 2000 au 23 juillet 2001 jusqu'au procès-verbal de notification d'infraction du 31 juillet 2007.
 
La Douane reproche à cette juridiction d’avoir retenu la prescription de la créance douanière à l'égard de ce commissionnaire (et d'annuler en conséquence son AMR) alors qu’elle a notifié en 2002, 2004 et 2006 des procès-verbaux à son client importateur qui ont un effet interruptif de prescription à l’égard de tous les participants à l’infraction douanière, et donc du commissionnaire ; selon la Douane, ses procès-verbaux dressés à l'encontre d'un débiteur ont pour effet d'interrompre la prescription du droit de reprise de l'administration à l'égard des co-débiteurs tenus solidairement au paiement de la même dette.
 
La Cour de cassation suit la Douane en se fondant sur l’ex-article 213 du Code des douanes communautaire alors applicable (« Lorsqu'il y a plusieurs débiteurs pour une même dette douanière, ils sont tenus au paiement de cette dette à titre solidaire ») et sur l’article 354 du Code des douanes (« La prescription est interrompue par la notification d'un procès-verbal de douane »). Pour la haute cour, il résulte de ces textes que la prescription est interrompue, à l'égard de tous les débiteurs d'une dette douanière, par la notification d'un procès-verbal de douane à l'un quelconque de ceux-ci. En retenant la prescription de la dette, la cour d’appel a donc violé ces textes, alors que le procès-verbal d'infraction du 31 juillet 2007 faisait mention de procès-verbaux de constat notifiés à l’importateur entre le 14 mai 2002 et le 14 mai 2007, dont la société était le commissionnaire en douane ce qui la rendait redevable de la dette douanière de celle-ci.
 
Et avec le CDU ?
 
La solution serait la même sous l’empire du Code des douanes de l’Union, son article 84 disposant de façon similaire à l’ex-article 213 du CDC : « lorsque plusieurs personnes sont redevables du montant de droits à l'importation ou à l'exportation correspondant à une dette douanière, elles sont tenues conjointement et solidairement au paiement de ce montant.
 
Remarques
La solution retenue par la Cour de cassation ci-dessus implique donc que la prescription de la dette douanière puisse être interrompue à l’encontre d’un opérateur sans qu’il le sache.
Cette solution s’oppose donc à celle de la cour d’appel de Riom en 2020 qui avait décidé exactement le contraire en retenant comme une « évidence » que la notification d'un procès-verbal par la Douane au débiteur principal, l'importateur en l'espèce, n'a pas un effet interruptif de prescription de la dette douanière à l'égard de toutes les parties, et donc pas dans cette affaire à l'égard de son commissionnaire en douane codébiteur de cette dette (voir notre actualité sur CA Riom, 24 nov. 2020, no 19/01311, Administration des douanes c/ Sagem Défense Sécurité et a.).
 
Plus d’information sur ce sujet dans Le Lamy transport, tome 2, n° 1499 et dans Le Lamy droit pénal des affaires, n° 4565. La décision ici présentée est intégrée au premier de ces numéros dans la version en ligne de l’ouvrage sur Lamyline dans les 48 heures au maximum à compter de la publication de la présente actualité.
 
 
Source : Actualités du droit